lundi 17 décembre 2007

Six milliards gaspillés en aides économiques

Un rapport de la Cour des comptes dénonce l’intervention confuse, coûteuse et inefficace des collectivités territoriales auprès des entreprises.

Après ce rapport, personne ne pourra plus s’interroger sur le faible intérêt des Français pour la décentralisation des compétences de l’État vers le pouvoir local. Et la Cour des comptes fait comprendre, au passage, le bon sens des «chers administrés». Elle montre en effet qu’en vingt-cinq ans, les collectivités locales n’ont jamais réussi à s’entendre pour distribuer de façon efficace les six milliards d’aides annuelles au développement économique évalués en 2004. Soit 66,52 euros par habitant en Île-de-France, mais 313,47 en Corse.

Le système qui avait déjà fait l’objet de plusieurs alertes et de différentes réformes, doit être remis à plat. Le premier président de la Cour, Philippe Séguin, a donné une solennité particulière à cette enquête réalisée par les 24 chambres régionales en se déplaçant hier à Poitiers pour la rendre publique.

Bilan accablant

Le bilan des magistrats est accablant. Il pointe «des dispositifs éclatés, complexes et peu coordonnés» en recensant, outre les communes, départements, Régions et leurs syndicats, une multitude d’agences de l’État. Soit une centaine d’intervenants qui distribuent des aides à travers 5 000 régimes différents pour un poids évalué à 6 milliards d’euros en 2004. Ce chiffre ne représente certes que 4 % des dépenses totales des collectivités, mais plus du quart de la seule taxe professionnelle, ainsi en partie reversée aux entreprises qui la paient. Les entreprises privées concentrent les soutiens à hauteur de deux milliards par an.

Pas un chapitre du rapport ne rattrape la sévérité du précédent. Manque de coordination, faible corrélation entre les aides versées et le développement économique, risques d’effets d’aubaine, évaluation et suivi insuffisants. De surcroît, l’ensemble des coûts de gestion atteindrait un tiers des aides versées... Ce rapport se veut une contribution à la réforme (dite revue générale) des politiques publiques, engagée par le gouvernement. L’une de ses priorités est précisément de réussir le «désenchevêtrement» des collectivités locales.

La Cour des comptes complète son enquête par des conseils précis. Ils appuient les préconisations de la commission du sénateur Alain Lambert qui prône la spécialisation des collectivités locales. C’est à dire en fait la suppression d’une particularité française, la clause de compétence générale, qui inquiète beaucoup les élus.

«Il faut recentrer les collectivités sur ce qu’elles savent faire» précise, sans ambages, Philippe Séguin. Si c’est à la Région que doit revenir l’essentiel de la responsabilité du développement économique, il est conseillé que le soutien financier soit distribué pour créer un environnement économique favorable et non pour aider directement telle ou telle entreprise.

Aux communes de s’occuper des infrastructures et zones d’activité, avec l’appui des départements pour les routes. Aux Régions de favoriser l’investissement dans la recherche et le développement avec l’État qui devra offrir l’environnement fiscal et social favorable à l’emploi.

le figaro